Évaluation statique et dynamique des structures impliquées lors de la déglutition

L’évaluation vidéoendoscopique de la déglutition est réalisée à l’aide d’un rhinopharyngoscope à fibre optique pour étudier la physiologie et la physiopathologie de certaines étapes de la déglutition, notamment l’étape pharyngée. Cet examen offre des informations détaillées sur la déglutition et sur les fonctions relatives des voies aériennes supérieures et du tube digestif supérieur. L’évaluation endoscopique de la déglutition peut également être réalisée en testant la sensibilité laryngée ; ceci est accompli en stimulant directement les différentes zones pharyngo-laryngées avec la pointe du rhinopharyngolaryngoscope. Cette évaluation peut être complétée par l’administration rythmique d’air dans une séquence de pressions, pour susciter l’adduction laryngée et par conséquent établir le seuil de sensibilité (FEESST).

Pendant l’examen FEES, il est possible de conserver des positions compensatoires pour améliorer l’efficacité de la déglutition et d’effectuer des manœuvres thérapeutiques qui peuvent aider à établir l’approche de réhabilitation appropriée pour gérer les techniques d’alimentation et de déglutition. Par conséquent, FEES offre la possibilité d’étudier la physiologie de la déglutition, l’évaluation de la présence, du degré et du type de dysphagie, et constitue également une bonne méthode pour établir le meilleur moyen d’alimentation (par la bouche, par la bouche avec des restrictions alimentaires, par sonde), pour indiquer et suivre des programmes de réhabilitation appropriés, pour conseiller des régimes alimentaires et pour planifier toute autre investigation diagnostique 18.

Des compétences spécifiques sont nécessaires pour réaliser un examen FEES : en particulier, l’oto-rhino-laryngologiste et/ou le spécialiste en phoniatrie impliqués doivent connaître la physiologie et la physiopathologie de la déglutition, les principaux troubles à l’origine de la dysphagie, ainsi que les manœuvres, exercices et techniques utilisés dans la rééducation. En outre, le spécialiste qui réalise la FEES doit non seulement être capable de prendre en charge un sujet présentant des troubles de la déglutition, mais aussi être bien formé à l’utilisation de l’endoscopie flexible – en particulier la FEES – chez les patients dysphagiques 19.

La vidéo-endoscopie permet une évaluation statique et dynamique des structures des voies aériennes supérieures et du tube digestif supérieur. En ce qui concerne l’investigation statique, trois positions principales sont recommandées pour l’extrémité de l’endoscope 1 2 20 : naso-pharyngée, position supérieure et position inférieure. Dans la position supérieure (avec l’endoscope à côté du velum palati), il est possible de détecter une stagnation des sécrétions dans les vallecules glossoépiglottiques, les récessions pyriformes, la zone interaryténoïde et le vestibule laryngé.

La position basse (l’endoscope est placé au niveau de l’aditus laryngé) est la plus appropriée pour étudier la fonction du sphincter laryngé, qui peut être testée en invitant simplement le patient à tousser, à avaler de la salive et à effectuer une manœuvre de Valsalva 7.

L’évaluation statique de la morphologie et de la fonction des voies aériennes supérieures et du tube digestif supérieur est suivie d’une évaluation dynamique de la déglutition, en administrant un bolus au patient. La présence d’une sécrétion abondante dans le vestibule laryngé ou une toux non protectrice peuvent être des contre-indications à un examen avec un bolus.

Avec les patients présentant un risque élevé d’inhalation d’un bolus, il est conseillé d’administrer un petit bolus d’eau colorée au bleu de méthylène (aliment teinté en bleu), afin de voir plus facilement tout liquide pénétrant dans les voies aériennes inférieures 17. Si le test est positif, sans déclencher de réflexes de protection, comme la toux, il est préférable de ne pas poursuivre l’évaluation dynamique avec des bolus d’autres consistances. En revanche, s’il est négatif, ou positif mais avec un réflexe protecteur efficace, il est conseillé de poursuivre le test dynamique en administrant des substances de consistance bien tolérée par le patient et de couleur contrastant avec celle de la muqueuse (ex.: lait, yaourt, confiture, gelée, pain, biscuits, etc.).

En ce qui concerne l’utilisation d’aliments teintés au bleu de méthylène, il ne faut pas oublier qu’un surdosage de cette substance peut provoquer des effets secondaires graves (hyper-bilirubinémie, anémie hémolytique du corps de Heinz, desquamation de la peau) 21. Il n’existe pas de directives consensuelles concernant le volume de colorant à ajouter à l’aliment ; cela diffère grandement d’un clinicien à l’autre et la quantité de colorant ajoutée est généralement « évaluée à l’œil » jusqu’à obtenir la nuance de bleu souhaitée 22 23.

Certains auteurs suggèrent de commencer l’évaluation dynamique avec des aliments solides, en réduisant progressivement la consistance du bolus, car il y a moins de probabilité d’inhaler des aliments de plus grande consistance 24. En outre, les liquides administrés au cours de la dernière étape de l’évaluation permettraient d’éliminer tout résidu du bolus dans les valvules glossoépiglottiques, à la base de la langue ou dans les creux pyriformes, diminuant ainsi le risque d’inhalation post-avale 24.

Une fois l’aliment administré, le patient doit le mâcher ou le désintégrer dans sa bouche et ne l’avaler que lorsqu’on le lui demande ; de cette manière, s’il y a une chute prématurée du bolus, elle est facilement visible. Ceci est fréquemment associé à la pénétration des restes de l’aliment dans le vestibule laryngé et dans les voies aériennes inférieures (inhalation avant déglutition). Le stade oro-pharyngé n’est pas visible par endoscopie lorsque le réflexe de déglutition commence, car l’endoscope sera en contact avec la base de la langue, avec l’épiglotte et le bolus lui-même (blanchiment de déglutition).

Pendant ce stade, une pénétration ou une inhalation de l’aliment peut se produire en raison d’une incompétence de la glotte (inhalation intra-glutition). L’inhalation doit être suspectée en présence de signes indirects tels que la toux ou les restes d’un bolus dans le vestibule laryngé. Si l’on suspecte une inhalation par ingestion, il est conseillé d’inviter le patient à tousser plusieurs fois car, dans certains cas, cela peut expulser les restes du bolus des voies aériennes inférieures, même quelques minutes après le passage de l’aliment. A la fin de chaque déglutition, il est important de voir si et où se trouvent les restes du bolus ; si ceux-ci sont abondants, ils pourraient pénétrer dans le larynx et provoquer une inhalation ultérieure (inhalation post-déglutition), éventuellement lorsque le patient tourne la tête ou lorsqu’il parle.

Par conséquent, l’inhalation du bolus peut se produire à la suite d’une altération de l’une des étapes de la déglutition, surtout si elle est associée à une efficacité réduite du réflexe de toux ; cette affection n’est pas toujours suspectée lors de l’évaluation de l’anamnèse et, si elle se présente sans symptômes ou associée à une toux inefficace, elle ne peut être mise en évidence que par des investigations instrumentales (FEES, vidéofluoroscopie, scintigraphie oro-pharyngo-oesophagienne).

L’inhalation d’un bolus lors d’une procédure FEES est doublement importante car non seulement elle est un élément fondamental nécessitant une investigation mais elle est aussi une complication à craindre. L’examen endoscopique dynamique avec des bolus de consistance différente permet non seulement de mettre en évidence une éventuelle inhalation mais aussi de révéler l’efficacité des différentes postures et manœuvres qui facilitent la déglutition et qui sont soit spontanées chez le patient, soit acquises après une rééducation spécifique.

Néanmoins, il ne faut pas oublier que l’inhalation d’un bolus est un facteur de risque de broncho-pneumonie infectieuse qui, chez les patients débilités, peut compromettre considérablement leur état de santé général et nécessiter un traitement d’urgence.

Lors de la réalisation de l’examen FEES et FEESST, il est nécessaire de faire passer l’endoscope dans les fosses nasales, le nasopharynx et le pharynx. Ce faisant, il est possible, en de rares occasions, de rencontrer des effets indésirables qui peuvent inclure : inconfort, bâillonnement et/ou vomissement, épistaxis antérieur, épistaxis postérieur, lacération de la muqueuse, réactions allergiques/hypersensibilité à l’anesthésie topique ou au spray nasal, effet indésirable du bleu de méthylène, réaction vasovagale et laryngospasme 6 10 18 25 26.

L’inconfort a été signalé comme l’effet indésirable le plus fréquent, mais l’utilisation d’une anesthésie topique peut en réduire l’occurrence, en affectant toutefois éventuellement les mécanismes de déglutition 27. Certains effets indésirables, tels que les modifications du rythme cardiaque, l’épistaxis, le laryngospasme et la réaction vasovagale, peuvent présenter des risques pour la santé du patient ; toutefois, des études ont montré que ces événements sont peu fréquents 28. Une étude portant sur 500 évaluations FEESST consécutives chez des patients présentant divers diagnostics sous-jacents, y compris un accident vasculaire cérébral et une maladie neurologique chronique, a révélé qu’une épistaxis mineure avec arrêt spontané du saignement s’est produite chez 0,6 % de la cohorte et qu’il n’y a eu aucune incidence de laryngospasme ou de réaction vasovagale 29. Des résultats similaires ont été trouvés chez 305 patients externes examinés en cabinet : compromission des voies aériennes 0 % et épistaxis 1,1 % 27. Sur les 6000 examens de FEES, Langmore et al. ont rapporté 2 incidents de laryngospasme (0,03%), 4 épisodes vasovagaux (0,06%) et 20 cas d’épistaxis (0,3%) 30.

Les complications possibles découlant de la FEES sont décrites dans le tableauIIII.

Tableau II

Complications avec la FEES.

Complications

Inconfort

Gargouillis et/ou vomissements

Épistaxis antérieur

Épistaxis postérieur

Lacération de la muqueuse

Vasovagal. épisodes

Réactions indésirables à l’anesthésie topique

Effet indésirable du bleu de méthylène

Laryngospasmes

Le risque global impliqué par FEES et FEESST est minime, mais il est recommandé aux cliniciens d’être bien formés aux signes et symptômes des effets indésirables et d’être prêts à prendre les mesures appropriées si ceux-ci se produisent 18 31.

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