Cas
Un homme de 68 ans souffrant d’hypertension, de diabète et d’une récente fracture de la hanche, avec un statut fonctionnel médiocre, se présente d’une maison de retraite avec une toux productive, un essoufflement et des frissons d’une durée de deux jours. Il a terminé un traitement de cinq jours à la céphalexine pour une infection des voies urinaires il y a une semaine. Ses signes vitaux révèlent une tension artérielle de 162/80 mm/Hg, une température de 101,9°F, une respiration de 26 respirations par minute et une saturation en oxygène de 88 % à l’air ambiant. Des bruits respiratoires grossiers sont notés dans le champ pulmonaire droit et sa radiographie pulmonaire révèle un infiltrat du lobe moyen droit.
Il est admis à l’hôpital avec un diagnostic de pneumonie associée aux soins. Quelle est la meilleure couverture antibiotique empirique pour ce patient ?
Une radiographie pulmonaire mettant en évidence une pneumonie du lobe moyen droit.
Overview
La médecine moderne existe sur un continuum de soins qui sont dispensés dans une multitude de contextes différents. Les patients reçoivent couramment des soins médicaux complexes à domicile, notamment le soin des plaies et la perfusion d’antibiotiques par voie intraveineuse. En outre, de nombreux patients sont en contact régulier avec le système de santé par l’intermédiaire de centres d’hémodialyse ou de centres de réadaptation subaiguë. En raison de ces interactions, les patients sont exposés à – et colonisés par – différents agents pathogènes bactériens qui peuvent entraîner une variété d’infections.1
Bien que les patients atteints de pneumonie associée aux soins (PAS) puissent se présenter de manière similaire à ceux atteints de pneumonie communautaire (PAC) – les patients atteints de PAC présentent normalement une infection des voies respiratoires inférieures – les différences dans les agents pathogènes étiologiques probables dictent que ces patients soient considérés pour des antibiotiques empiriques à spectre plus large. Les hospitaliers continueront d’être responsables du choix du régime antibiotique initial pour ces patients, et ils doivent être en mesure de reconnaître ce processus pathologique afin de le traiter de manière appropriée.
Les directives conjointes de l’American Thoracic Society (ATS) et de l’Infectious Diseases Society of America (IDSA) publiées en 2005 soulignent que certains facteurs de risque cliniques de PAC sont centrés sur l’augmentation des interactions et des rencontres avec les établissements de santé2. Ces facteurs de risque évoluent avec le temps pour inclure l’état fonctionnel du patient, l’utilisation récente d’antibiotiques et la gravité clinique.
Examen des données
Différences entre la PCHA et la PAC
La PCHA représente une catégorie diagnostique de pneumonie créée pour différencier les patients atteints d’infections causées par un sous-ensemble microbiologique différent de bactéries, y compris d’éventuels organismes multirésistants (MDR), des patients atteints de PAC. Jusqu’à présent, les données de culture soutiennent cette dichotomie.3,4
Kollef et ses collègues ont réalisé une étude de cohorte rétrospective multicentrique portant sur 4 543 patients atteints de pneumonie bactérienne respiratoire à culture positive entre 2002 et 2003. L’étude a examiné les différences bactériologiques entre la PAC et la PCHA. Dans cette étude, les patients atteints de PAC étaient définis comme ayant été transférés d’un autre établissement de santé, soumis à une hémodialyse à long terme ou hospitalisés dans les 30 jours pour une pneumonie non associée à la ventilation (PAV). Les patients atteints de PAC ont été définis comme ayant une PVA non associée au ventilateur et une PAC non associée au ventilateur.
L’étude a montré que la fréquence de Pseudomonas aeurginosa (25 % de PAC contre 17 % de PAC) et de Staphylococcus aureus (46 % contre 25 %), qui comprenait le Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline (SARM) (18 % contre 6 %), était significativement plus élevée chez les patients atteints de PAC que chez ceux atteints de PAC. De plus, la fréquence des infections à Streptococcus pneumoniae (5 % contre 16 %) et à Haemophilus influenza (5 % contre 16 %) était significativement plus faible.3
Une analyse de cohorte rétrospective monocentrique de 639 patients réalisée par Micek et al a donné des différences de culture similaires entre les patients atteints de PAC et de HCAP. Dans cette étude, les critères d’HCAP étaient définis comme une hospitalisation au cours de l’année précédente, une immunosuppression, un résident de maison de retraite ou une hémodialyse. Les auteurs de l’étude ont constaté qu’un pourcentage significativement plus élevé de patients atteints de PCHA étaient infectés par le SARM (30 % contre 12 %), le Pseudomonas aeurginosa (25 % contre 4 %) et d’autres bâtonnets gram-négatifs (GNR) non fermentaires (10 % contre 2 %). Les patients HCAP ont à nouveau été notés comme ayant significativement moins d’infections à S. pneumoniae (10% contre 40%) et à Haemophilus influenza (4% contre 17%).
En plus de montrer une différence dans la bactériologie de la PAC et de la HCAP, l’étude de Kollef a également évalué les taux de mortalité, la durée du séjour et les frais d’hospitalisation. Les taux de mortalité de la PCHA (19,8 %) étaient similaires à ceux de la pneumonie acquise à l’hôpital (PAH) (18,8 %), et tous deux étaient significativement plus élevés que ceux de la PAC (10 %). La durée du séjour et le coût de l’hospitalisation ont augmenté dans tout le spectre, de la PAC à la PCH et à la PCH, avec des différences significatives entre chacune.3
Lignes directrices de l’ATS et de l’ISDA
En 2005, un comité conjoint de l’ATS et de l’ISDA a mis à jour ses lignes directrices initiales de 1996 sur la pneumonie nosocomiale. La mise à jour des lignes directrices incluait la nouvelle catégorie HCAP.2 L’objectif n° 1 de ces lignes directrices était de mettre l’accent sur une antibiothérapie précoce et appropriée, suivie d’une adaptation du schéma thérapeutique en fonction de la culture et des données cliniques. À cette fin, les facteurs de risque de la catégorie HCAP ont été élaborés par extrapolation à partir de données d’observation générées par des patients atteints de PCH et de PVA.5,6,7
Les facteurs de risque sont résumés dans le tableau 1 (voir p. 19).2 Les directives stipulent que l’identification de l’un de ces facteurs de risque chez les patients atteints de pneumonie au moment de l’admission indique un risque accru d’infection par un organisme multirésistant. Ces patients à haut risque doivent être placés dans la catégorie diagnostique de l’HCAP.
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Une fois qu’un patient a été diagnostiqué avec une HCAP, les directives recommandent d’obtenir des cultures des voies respiratoires inférieures et d’initier une antibiothérapie à large spectre. Il a été suggéré que l’antibiothérapie empirique appropriée soit la même que pour la PCH. Ce régime nécessite une couverture avec deux agents anti-pseudomonaux, ainsi qu’un agent ayant une activité contre le SARM.
La justification de la couverture initiale avec deux agents anti-pseudomonaux découle de la constatation que le pseudomonas a un taux élevé de résistance à de nombreux antibiotiques, et que si deux agents sont commencés empiriquement, les chances de couverture appropriée augmentent dès le départ. Ceci est important, car il a été démontré que l’administration en temps opportun d’antibiotiques appropriés diminue la mortalité dans les infections.8
Les considérations supplémentaires pour le traitement antibiotique empirique incluent les sensibilités des données microbiologiques locales, ainsi que tout régime antibiotique récent administré au patient. Après cette large couverture antibiotique primaire, une désescalade était recommandée en fonction des résultats des cultures des voies respiratoires inférieures et de l’amélioration clinique.2
Évolution des critères diagnostiques et de la couverture antibiotique empirique
Depuis la publication des directives ATS/IDSA de 2005, les facteurs de risque susmentionnés pour la PCHA ont été remis en question, car ils n’ont pas encore été validés par des essais prospectifs. On craint de plus en plus que ces critères ne soient pas suffisamment spécifiques et, par conséquent, qu’ils puissent appeler à traiter un trop grand nombre de patients avec un spectre plus large d’antibiotiques, augmentant ainsi la probabilité de développer des bactéries MDR.
Afin d’analyser plus en détail les critères HCAP, Poch et Ost ont écrit une revue plus tôt cette année examinant les données derrière chacun des facteurs de risque cités dans les directives ATS/IDSA ; ils ont trouvé une hétérogénéité considérable dans l’ampleur du risque d’infection MDR pour ces critères9. Les auteurs ont également examiné les études portant sur d’autres facteurs de risque d’infections à MDR chez les patients vivant en maison de retraite ou atteints de PAC. Ils ont proposé que des facteurs supplémentaires tels que les risques spécifiques aux patients (notamment l’état fonctionnel et l’exposition antérieure aux antibiotiques) et les risques contextuels (notamment le ratio infirmière-patient) soient évalués et éventuellement intégrés aux critères.
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De tous les patients présentant des critères HCAP, les résidents des maisons de retraite ont été les mieux étudiés. Loeb et al, alors qu’ils cherchaient un moyen de diminuer les hospitalisations des résidents des maisons de retraite, ont montré que les patients qui contractent une pneumonie (selon la définition de la directive HCAP) peuvent être traités efficacement en ambulatoire avec un seul agent antibiotique.10 Cet essai contrôlé randomisé portant sur 680 patients, tous atteints de HCAP, ont été traités par lévofloxacine orale à la maison de retraite ou admis à l’hôpital. Aucune différence significative n’a été constatée entre les deux groupes en ce qui concerne la mortalité (8 % contre 9 %) et les mesures de la qualité de vie. En outre, l’analyse des données des années 1980 a montré que la pneumonie acquise en maison de repos pouvait être traitée efficacement avec des agents uniques.11,12
Pour répondre à certaines des questions concernant le HCAP, des leaders nationaux des maladies infectieuses ont été réunis pour répondre à un certain nombre de questions sur le HCAP.13 L’une des questions portait sur la couverture empirique recommandée pour le HCAP. L’une des questions portait sur la couverture empirique recommandée pour la PCHA. Compte tenu des études susmentionnées sur les patients des maisons de retraite, un désaccord est apparu sur la nécessité de traiter empiriquement tous les patients atteints de PCHA avec des antibiotiques à large spectre. Par conséquent, une autre évaluation des facteurs de risque d’infections MDR a été proposée (voir tableau 2, p. 20) et un consensus a été atteint, aboutissant aux recommandations actuelles. Les recommandations actuelles stipulent qu’une fois qu’un patient a satisfait aux critères de la HCAP, s’il présente des facteurs de risque MDR supplémentaires, alors une couverture antibiotique large est recommandée ; cependant, si aucun risque MDR supplémentaire n’est trouvé, alors une couverture plus conservatrice et plus étroite pourrait être donnée (voir Tableau 3, p. 31).13
Préoccupations supplémentaires
Des études supplémentaires sont nécessaires pour affiner et valider les critères diagnostiques spécifiques de la HCAP, ainsi que les facteurs de risque infectieux MDR. Par ailleurs, les recommandations actuelles préconisent d’obtenir des cultures des voies respiratoires inférieures chez tous les patients atteints de pneumonie et de titrer la couverture antibiotique en fonction de ces résultats. Cette pratique semble toutefois peu répandue. Davantage de données sont nécessaires pour guider davantage le traitement après l’initiation d’une couverture antibiotique empirique sans l’orientation des données de culture, en se fiant plutôt aux paramètres cliniques.
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Retour au cas
Ce patient répondait aux critères initiaux du PACS parce qu’il était résident d’une maison de retraite, et on a constaté qu’il présentait des facteurs de risque supplémentaires de MDR (mauvais état fonctionnel et traitement antibiotique récent). Par conséquent, des cultures des voies respiratoires inférieures ont été réalisées, une oxygénation supplémentaire a été mise en place et un traitement par pipéracilline/tazobactam plus lévofloxacine et vancomycine (en tenant compte des profils de résistance locaux) a été administré. Son état clinique s’est amélioré au cours des deux jours suivants. Ses cultures d’expectoration ont cultivé Pseudomonas aeuroginosa, qui était sensible à la pipéracilline/tazobactam mais résistant à la lévofloxacine.
La vancomycine et la lévofloxacine ont été interrompues, et il a été traité avec un cours de sept jours de pipéracilline/tazobactam.
La ligne de fond
Pour les adultes qui se présentent avec une pneumonie provenant de la communauté, une attention particulière doit être accordée à certaines parties de l’histoire du patient pour déterminer s’il a une HCAP.
Les patients qui ont une HCAP peuvent bénéficier d’une couverture antibiotique empirique à large spectre, qui, selon le consensus actuel des experts, dépend d’autres facteurs de risque d’infection MDR. TH
Le Dr Rohde est hospitalier à la faculté de médecine de l’Université du Michigan à Ann Arbor.
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