Seconde Guerre mondiale (WWII)

Le chemin de la guerre

Les souvenirs de la Première Guerre mondiale – les pertes tragiques en vies humaines, le lourd fardeau de la dette et la pression sur l’unité du pays imposée par la conscription – font que les Canadiens, y compris les politiciens de tous les partis, répugnent à envisager une autre expérience de ce genre. Au départ, le premier ministre William Lyon Mackenzie King appuie chaleureusement la politique du premier ministre britannique Neville Chamberlain visant à apaiser le leader allemand Adolf Hitler. Lorsque Chamberlain repousse la guerre en sacrifiant la Tchécoslovaquie lors de la crise de Munich en septembre 1938, King le remercie publiquement, et les Canadiens en général sont certainement d’accord. Néanmoins, le choc de cette crise a probablement fait pencher l’opinion vers l’acceptation de la guerre pour freiner l’avancée du nazisme. Ce n’est que progressivement que l’agression nazie continue a modifié cet état d’esprit au point que le Canada était prêt à prendre part à une autre grande guerre. King lui-même ne doutait pas que dans une grande guerre impliquant la Grande-Bretagne, le Canada ne pourrait pas rester à l’écart.

Déclaration et mobilisation

Lorsque l’attaque allemande contre la Pologne, le 1er septembre 1939, a finalement amené la Grande-Bretagne et la France à déclarer la guerre à l’Allemagne, King a convoqué le Parlementpour  » décider « , comme il s’y était engagé. La déclaration de guerre a été reportée d’une semaine, pendant laquelle le Canada est resté officiellement neutre. Le gouvernement a annoncé que l’approbation de l' »Adresse en réponse au discours du Trône », qui énonçait la décision du gouvernement de soutenir la Grande-Bretagne et la France, constituerait l’approbation d’une déclaration de guerre.

Le 9 septembre, l’adresse a été approuvée sans vote enregistré, et la guerre a été déclarée le jour suivant. La base de l’unité parlementaire avait en fait été posée en mars, lorsque les deux principaux partis avaient accepté un programme rejetant la conscription pour le service outre-mer.King envisageait clairement un effort limité et était tiède à l’égard d’un corps expéditionnaire. Néanmoins, la pression est suffisante pour amener le Cabinet à envoyer une division de l’armée en Europe. La défaite des Alliés en France et en Belgique au début de l’été 1940 et l’effondrement de la France effraient les Canadiens. L’idée d’une guerre limitée et économique est passée à la trappe, la seule limitation étant alors l’engagement contre la conscription outre-mer. Les forces armées furent rapidement élargies, la conscription fut introduite en juin 1940 pour la défense intérieure (voir Loi sur la mobilisation des ressources nationales), et les dépenses augmentèrent énormément.

Dieppe, Hong Kong et l’Italie

L’armée s’agrandit, et à la fin de 1942, il y avait cinq divisions outre-mer, dont deux blindées. En avril de la même année, la Première armée canadienne est formée en Angleterre sous la direction du lieutenant-général A.G.L. McNaughton. Contrairement à ce qui s’est passé pendant la Première Guerre mondiale, il a fallu attendre longtemps avant que l’armée ne soit confrontée à une action de grande envergure. Jusqu’à l’été 1943, la force en Angleterre n’a participé qu’à l’échec du raid de Dieppe (19 août 1942), alors que deux bataillons envoyés du Canada avaient pris part à la défense désespérée de Hong Kong contre les Japonais en décembre 1941. L’opinion publique canadienne fut troublée par cette inaction, et un désaccord se développa entre le gouvernement et McNaughton, qui souhaitait réserver l’armée pour une dernière campagne décisive.

Le gouvernement s’arrangea avec la Grande-Bretagne pour que la 1re division d’infanterie canadienne se joigne à l’attaque de la Sicile en juillet 1943, et insista par la suite pour que sa force méditerranéenne devienne un corps de deux divisions (en ajoutant la 5e division). Cela provoque un grave conflit avec McNaughton, au moment même où le War Office britannique, qui le considère comme inapte au commandement en campagne, influence le gouvernement canadien contre lui. À la fin de 1943, il est remplacé par le lieutenant-général H.D.G. Crerar.

La 1re division est fortement engagée dans la campagne de Sicile au sein de la Huitième armée britannique, et prend ensuite part à l’avancée de décembre 1943 sur le continent italien, voyant des combats particulièrement sévères à Ortona et dans ses environs.(Voir aussi : La campagne d’Italie.) Au printemps 1944, les Canadiens, sous les ordres du lieutenant-général E.L.M. Burns, ont joué un rôle de premier plan dans la percée de la ligne Hitler qui barrait la vallée du Liri. À la fin du mois d’août, le corps a brisé la ligne Gothique dans le secteur de l’Adriatique et a poussé à travers les positions allemandes couvrant Rimini, qui est tombée en septembre. Ces batailles ont coûté au Canada ses plus lourdes pertes de la campagne d’Italie.

La phase finale de la participation canadienne en Italie trouve le 1er Corps canadien, maintenant commandé par le lieutenant-général Charles Foulkes, luttant pour traverser la plaine de Lombardie, entravé par la boue et les rivières au débit rapide.L’avance du corps se termine à la rivière Senio dans les premiers jours de 1945. Le gouvernement canadien, si désireux d’envoyer ses troupes au combat en Italie, avait bientôt commencé à demander leur retour pour rejoindre la principale force canadienne en Europe du Nord-Ouest. La politique des Alliés rendit finalement cela possible au début de 1945, et le 1er Corps passa sous le commandement de la Première Armée canadienne à la mi-mars, à la satisfaction générale des hommes venus d’Italie. Au total, 92 757 soldats canadiens de tous grades avaient servi en Italie, et 5 764 y avaient perdu la vie.

La campagne de Normandie

Débarquement en Normandie
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Des fantassins du Régiment de la Chaudière se reposent derrière un Universal Carrier en position basse le long de la tête de pont de Normandie en juin, 1944.\u00a0\r\nImage :Lieut. Ken Bell / Ministère canadien de la Défense nationale / Bibliothèque et Archives Canada/ PA-140849.\r\n
Le caporal suppléant W.J. Curtis du Corps médical royal canadien (C.M.R.A.) panse la jambe brûlée d’un garçon français dont le frère regarde à Boissons, en France. Boissons, France, 19 juin 1944. Image: Lieutenant Ken Bell / Ministère canadien de la Défense nationale / Bibliothèque et Archives Canada / PA-141703.
Falaise, Bataille pour

Major David Currie

Dans la dernière grande campagne du nord-ouest de l’Europe, débutant par l’invasion de la Normandie (nom de code Opération Overlord) le 6 juin 1944, la Première Armée canadienne sous les ordres de Crerar a joué un rôle important et coûteux. Le noyau central de l’armée était le 2e Corps canadien, commandé par le lieutenant-général G.G. Simonds, qui avait commandé la 1re Division en Sicile ; il était composé des 2e et 3e Divisions d’infanterie canadiennes et de la 4e Division blindée canadienne. Dans l’ensemble, l’armée faisait partie du 21e groupe d’armées britannique commandé par le général Sir (plus tard Field-Marshal Lord) Bernard Law Montgomery.

Dans la phase de débarquement, seules la 3e division et la 2e brigade blindée canadienne étaient engagées et combattaient sous la 2e armée britannique. Ces formations débarquèrent le jour J sur une section du littoral désignée par les Canadiens sous le nom de code Juno Beach.Les combats furent âpres sur la plage, et par la suite lorsque les Canadiens s’enfoncèrent dans les terres.

Les formations canadiennes ont joué un rôle de premier plan dans l’évasion de la tête de pont de Normandie en août, luttant contre une opposition féroce pour atteindre la ville française de Falaise et, par la suite, pour fermer la brèche au sud de celle-ci par laquelle l’ennemi se retiraitpour éviter d’être piégé entre les Britanniques et les Canadiens venant du nord et les Américains approchant du sud. Falaise fut prise le 16 août et le 19, les Alliés établirent finalement le contact à travers la brèche.

Belgique, Hollande et Allemagne

La phase suivante fut celle de la poursuite vers la frontière allemande. La 1re armée canadienne, commandée par le 1er corps britannique, dégage les forteresses côtières, prenant tour à tour Le Havre, Boulogne et Calais. Début septembre, les Britanniques s’emparent d’Anvers, mais l’ennemi tient toujours les rives de l’Escaut entre ce port indispensable et la mer. Les Canadiens livrent une bataille acharnée pour ouvrir le fleuve pendant tout le mois d’octobre et la première semaine de novembre.

La première grande opération canadienne de 1945, la bataille de la Rhénanie, consiste à nettoyer la zone située entre la Meuse et le Rhin ; elle débute le 8 février et ne se termine que le 10 mars, lorsque les Allemands, repoussés par les Canadiens et la poussée convergente de la 9e armée américaine, se retirent au-delà du Rhin. Les dernières opérations à l’ouest commencent par la traversée du Rhin dans la zone britannique le 23 mars ; par la suite, la 1re Armée canadienne, toujours à gauche de la ligne, libère l’est et le nord des Pays-Bas et avance dans la plaine du nord de l’Allemagne (voir Libération des Pays-Bas). Lorsque les Allemands se rendent sur le front du maréchal Montgomery le 5 mai, le 2e Corps canadien a pris Oldenburg, et le 1er Corps canadien tient fermement la ligne de la rivière Grebbe tandis que, grâce à un arrangement avec les Allemands, des vivres sont envoyés dans les Pays-Bas occidentaux affamés.Toute la campagne a coûté à l’Armée canadienne 11 336 morts. Quelque 237 000 hommes et femmes de l’armée avaient servi dans le nord-ouest de l’Europe.

La campagne aérienne

L’effort de guerre de l’Aviation royale du Canada a été profondément affecté par sa gestion du plan d’entraînement aérien du Commonwealth britannique. Un grand nombre de Canadiens ont servi dans des unités de laRoyal Air Force de Grande-Bretagne, et la croissance d’une organisation aérienne nationale canadienne outre-mer a été retardée. Néanmoins, au moment de la capitulation de l’Allemagne, 48 escadrons de l’ARC se trouvaient outre-mer et étaient presque entièrement composés d’officiers et d’hommes canadiens. La formation du 6e groupe de bombardiers (ARC) du Bomber Command de la RAF, le 1er janvier 1943, constitue un événement marquant. Ce groupe a fini par compter 14 escadrons. Il est commandé successivement par les vice-maréchaux de l’air G.E. Brookes et C.M. McEwen. La tâche du Bomber Command était le bombardement nocturne de l’Allemagne, un travail désespérément périlleux exigeant une force d’âme soutenue. Près de 10 000 Canadiens ont perdu la vie dans ce commandement.

Les aviateurs canadiens ont servi sur tous les théâtres, à partir de bases situées au Royaume-Uni, en Afrique du Nord, en Italie, en Europe du Nord-Ouest et en Asie du Sud-Est. Les escadrons d’Amérique du Nord ont travaillé aux opérations anti-sous-marines au large de la côte atlantique et ont coopéré avec les forces aériennes américaines contre les Japonais dans les îles Aléoutiennes. À un moment ou à un autre, sept escadrons de l’ARC ont servi au sein du Coastal Command de la RAF au-dessus de l’Atlantique. Les appareils de l’ARC ont détruit ou participé à la destruction de 20 sous-marins ennemis. Dans la campagne du nord-ouest de l’Europe de 1944-45, le CARC a déployé 17 escadrons. Pendant la guerre, 232 632 hommes et 17 030 femmes ont servi dans l’ARC, et 17 101 ont perdu la vie.

La guerre navale

Destroyeurs canadiens
HMCS St. Laurent at Halifax, par Edwin Holgate, 1941, peinture à l’huile sur toile. Le 2 juillet 1940, le St. Laurent a sauvé plus de 850 personnes après que le paquebot Arandora Star ait été coulé par un sous-marin allemand. En décembre 1941, il a coulé le U-Boat 356 alors qu’il servait d’escorte à un convoi (courtoisie du Musée canadien de la guerre/11489).
Frigate dans l'Atlantique Nord

La Marine royale canadienne était minuscule en 1939, mais son expansion pendant la guerre a été remarquable : elle a enrôlé 99 688 hommes et quelque 6 500 femmes. Elle a armé 471 navires de combat de divers types. Sa tâche principale est le convoyage, c’est-à-dire la protection des navires de transport de troupes et de ravitaillement qui traversent l’Atlantique. Elle assume une part de plus en plus importante de ce fardeau, livrant de sinistres batailles, parfois de plusieurs jours, contre les  » meutes de loups  » des U-boote. « Sa vaste expansion entraîne quelques difficultés de croissance ; en 1943, des mesures doivent être prises pour améliorer l’équipement technique de ses navires d’escorte et, dans certains cas, la formation des équipages. Au cours de la guerre, il a coulé ou participé au naufrage de 33 sous-marins ennemis.

Après la Conférence sur les convois de l’Atlantique, qui s’est tenue à Washington en mars 1943, le Commandement canadien de l’Atlantique Nord-Ouest a été créé, couvrant la zone située au nord de la ville de New York et à l’ouest du 47e méridien ; un officier canadien, le contre-amiral L.W. Murrary, était responsable des convois dans cette zone. Outre leur tâche principale dans la bataille de l’Atlantique, les unités navales canadiennes ont participé à de nombreuses autres campagnes, notamment en soutenant les débarquements alliés en Afrique du Nord en novembre 1942 ; et aux opérations de Normandie de juin 1944, la MRC a fourni quelque 110 navires et 10 000 hommes.

Pendant la guerre, elle a perdu 24 navires de guerre, allant du destroyer de classe « Tribal » Athabaskan, coulé dans la Manche en avril 1944, au yacht armé Raccoon, torpillé dans le Saint-Laurent en septembre 1942 (voir Opérations des U-Boat).En personnel, la marine compte 2 024 morts.

La contribution industrielle

Premier bombardier Lancaster

La contribution industrielle du Canada à la victoire fut considérable, bien qu’elle ait commencé lentement. Après les revers des Alliés en Europe en 1940, les commandes britanniques d’équipement, qui n’étaient qu’un filet d’eau, devinrent un déluge. En avril 1940, le ministère des Munitions et des Approvisionnements, prévu en 1939, est créé avec C.D. Howe comme ministre. En août 1940, une loi modifiée confère au ministre des pouvoirs quasi dictatoriaux et, sous son égide, l’effort industriel s’est considérablement accru. Diverses sociétés d’État sont créées pour des tâches spéciales. De nouvelles usines furent construites, et les anciennes adaptées aux besoins de la guerre.

Alors que pendant la Première Guerre mondiale, la production canadienne s’était largement limitée aux obus (aucune arme n’était fabriquée à l’exception du fusil Ross), on produisait désormais une grande variété de canons et d’armes légères. De nombreux navires, notamment des navires d’escorte et des cargos, ont été construits ; il y a eu une grande production d’avions, notamment de bombardiers Lancaster ; et le plus grand triomphe du programme a été dans le domaine des véhicules militaires, dont 815 729 ont été fabriqués.

Une grande partie du travail dans les usines de la nation, et dans les services militaires du front intérieur, a été effectuée par des femmes, qui ont été recrutées dans la population active, pour la plupart pour la première fois, afin d’occuper les emplois laissés vacants par les hommes en service à l’étranger.

Plus de la moitié du matériel de guerre industriel produit est allé en Grande-Bretagne. La Grande-Bretagne ne pouvait pas en payer la totalité ; le Canada, dans le but de contribuer à la victoire et de faire fonctionner ses usines, en a donc financé une grande partie. Au début de 1942, un don d’un milliard de dollars a été consacré à cette fin. L’année suivante, un programme d’aide mutuelle destiné à servir les nations alliées en général, mais qui, en pratique, s’adressait toujours principalement à la Grande-Bretagne, a été introduit. Pendant la guerre, l’aide financière canadienne à la Grande-Bretagne s’est élevée à 3 043 000 000 $.

Guerre atomique

Le Canada a joué un rôle limité dans le développement de l’énergie atomique, une entreprise fatidique qui s’est révélée lorsque les bombes atomiques ont été larguées sur le Japon en août 1945. Le Canada disposait d’une source d’uranium dans une mine du Grand lac de l’Ours, ce qui valut à MackenzieKing d’être mis dans la confidence des grands Alliés en la matière en 1942. Cet été-là, le gouvernement canadien prend le contrôle de la mine. Une équipe de scientifiques qui travaillait sur le projet en Angleterre est transférée au Canada.

Des tensions se développent entre la Grande-Bretagne et les États-Unis, mais à la conférence de Québec de septembre 1943, un accord anglo-américain est conclu qui, incidemment, donne au Canada une petite part du contrôle. Un comité d’orientation canadien décide en 1944 de construire un réacteur atomique aux Laboratoires nucléaires de Chalk. Le premier réacteur n’est devenu critique qu’après la capitulation du Japon. Le Canada n’a joué aucun rôle dans la production des bombes utilisées contre le Japon, à moins que de l’uranium canadien y ait été utilisé, ce qui semble impossible à déterminer.

Relations avec les Alliés

Le Canada n’a joué aucun rôle effectif dans la direction supérieure de la guerre. Cela aurait été extrêmement difficile à obtenir, et King ne s’est jamais fortement efforcé de l’obtenir. Il est possible qu’il ait anticipé que cela aurait un effet négatif sur ses relations personnelles avec le premier ministre britannique Winston Churchill et le président américain Franklin D. Roosevelt, qu’il considérait comme très importantes pour lui sur le plan politique.

La stratégie des Alliés occidentaux était décidée par le Combined Chiefs of Staff, un comité purement anglo-américain. Ses décisions les plus importantes étaient prises lors de conférences périodiques avec les dirigeants politiques,dont deux se tenaient à Québec. Même à ces conférences, King n’est présent qu’en tant qu’hôte. Bien que les forces canadiennes aient été employées conformément aux décisions des chefs d’état-major, il est curieux que le Canada n’ait jamais été officiellement informé de l’institution du comité à la fin de 1941. Même la reconnaissance officielle de la souveraineté canadienne était minime ; bien que les directives des commandants alliés pour la guerre contre le Japon aient été émises au nom des États-Unis, de la Grande-Bretagne, de l ‘ Australie et de la Nouvelle-Zélande, la directive adressée au général Dwight D. Eisenhower, commandant suprême du nord-ouest de l ‘ Europe, sous les ordres duquel servaient d ‘ importantes forces canadiennes, ne mentionnait pas le Canada.

Les relations canadiennes avec les États-Unis se sont notablement resserrées pendant la guerre. Dès sa prise de fonction en 1935, King avait cultivé ses liens avec Roosevelt. Pendant les premiers mois de la guerre, les contacts sont rares, mais les craintes suscitées par les premières victoires allemandes entraînent immédiatement un rapprochement. Le 18 août 1940, King et Roosevelt, réunis à Ogdensburg, dans l’État de New York, annoncent un accord (qui n’est pas un traité officiel) visant à créer une Commission permanente mixte de défense, qui se réunit fréquemment par la suite pour discuter des problèmes de défense mutuelle. En 1941, la balance des paiements du Canada avec les États-Unis devient grave, en grande partie à cause de la difficulté de financer les importations en provenance des États-Unis résultant de la production industrielle du Canada pour la Grande-Bretagne. Le problème est résolu par la déclaration de Hyde Park du 20 avril. Néanmoins, King s’inquiète parfois de ce qu’il considère comme un danger d’absorption du Canada par les États-Unis. Une réaction à l’activité américaine dans le Nord canadien (par exemple, la construction de la route de l’Alaska en 1942) fut la nomination en 1943 d’un commissaire spécial pour les projets de défense dans le Nord-Ouest, afin de renforcer le contrôle canadien dans la région.

La question de la conscription

Les pires problèmes politiques qui se posèrent au Canada pendant la guerre trouvèrent leur origine dans la question de la conscription, et King eut plus de difficultés dans son propre Parti libéral qu’avec l’opposition. L’élection du 26 mars 1940, avant que la guerre n’atteigne un stade critique, indique que le pays se satisfait d’un effort de guerre limité et donne à King une solide majorité. Le manque d’enthousiasme du Canada français pour la guerre et son opposition particulière à la conscription étaient aussi évidents que lors de la Première Guerre mondiale (les enrôlements volontaires au Québec ne représentaient qu’environ 4 % de la population, alors qu’ailleurs ce chiffre était d’environ 10 %). En 1942, l’agitation en faveur de la conscription outre-mer dans les régions anglophones du pays amène King à tenir un plébiscite sur la libération du gouvernement de son engagement. Le résultat est un vote massif en faveur de la libération dans toutes les provinces sauf le Québec. Néanmoins, l’enthousiasme pour la conscription reste faible au Canada anglais ; lorsqu’Arthur Meighen revient à la tête du Parti conservateur et préconise la conscription outre-mer, il ne parvient même pas à se faire élire dans une circonscription de Toronto. Mais l’atmosphère change après l’augmentation des pertes.

Après la campagne de Normandie en 1944, une pénurie de renforts d’infanterie se fait sentir et le ministre de la Défense nationale, le colonel J.L. Ralston, déclare au Cabinet que le temps de la conscription outre-mer est venu. King, qui s’était apparemment convaincu qu’il existait une conspiration au sein du ministère pour le déloger et remplacer Ralston, congédie ce dernier et le remplace par McNaughton. Ce dernier ne réussit pas à convaincre un grand nombre de conscrits de la défense nationale de se porter volontaires pour le service outre-mer, et King, se trouvant confronté à des démissions de ministres conscriptionnistes, ce qui aurait ruiné son gouvernement, accepte d’envoyer un grand groupe de conscrits outre-mer. Le Québec accepte à contrecœur la situation,préférant celle de King à toute administration conservatrice, et il est à nouveau en sécurité jusqu’à la fin de la guerre.

Faire la paix

Le Canada a eu peu de part dans la réalisation de la paix. Les grandes puissances, qui avaient gardé la direction de la guerre entre leurs mains, faisaient de même maintenant. La soi-disant conférence de paix qui s’est tenue à Paris au cours de l’été 1946 n’a fait que donner aux Alliés de moindre importance, dont le Canada, l’occasion de commenter les arrangements déjà pris. Le Canada ne signa des traités qu’avec l’Italie, la Hongrie, la Roumanie et la Finlande. L’Allemagne étant divisée et la partie orientale du pays étant dominée par l’Union soviétique, il n’y a jamais eu de traité avec l’Allemagne.En 1951, le Canada, comme les autres puissances occidentales, a mis fin à l’état de guerre avec l’Allemagne par proclamation royale. Cette année-là, un traité de paix avec le Japon, rédigé par les États-Unis, est signé par la plupart des États alliés, dont le Canada (mais pas les puissances communistes).

Coût et importance

Le coût financier de l’effort de guerre canadien était astronomique. Les dépenses pour l’année fiscale 1939-40 étaient d’un modeste 118 291 000 $. L’année suivante, elles sont passées à 752 045 000 $ ; durant l’année record, 1943-44, elles ont atteint 4 587 023 000 $. Le total jusqu’à l’année fiscale 1949-50, pour les 11 années commençant en 1939-40, était de 21 786 077 519,12 $. D’autres coûts dus à la guerre ont continué à s’accumuler. Pendant la guerre, 1 086 343 Canadiens et Canadiennes ont servi à plein temps dans les trois services. Le coût en sang a été moins important que lors de la Première Guerre mondiale, mais tout de même tragique : près de 44 000 ont perdu la vie, y compris les marins morts en servant dans la marine marchande.

L’importance de la Seconde Guerre mondiale dans l’histoire du Canada a été grande, mais probablement moins que celle de la Première. L’unité nationale entre Français et Anglais a été endommagée, mais heureusement pas aussi gravement qu’entre 1914 et 1918. L’économie a été renforcée et sa capacité manufacturière beaucoup diversifiée. La fierté et la confiance nationales ont été renforcées. Le statut de pays indépendant, qui n’a été établi que de façon fragile en 1919, ne fait plus aucun doute après 1945. Le Canada est une puissance à part entière, même si elle est modeste. D’autre part, il est devenu douloureusement clair que le « statut » n’implique pas nécessairement l’influence. Une puissance moyenne doit limiter ses aspirations. La véritable autorité dans le monde demeurait entre les mains des grands bataillons,des grandes populations et des grandes fortunes.

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